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JD Magazine n°9 / Littérature : “ VERS-TIGE ”

A l’état civil, je me nomme Brice KOUADIO Konin. Je suis ophtalmologue de formation et écrivain, auteur de romans, de recueils de nouvelles et d’œuvres poétiques. Je suis titulaire d’un Master en communication et marketing et d’une Maîtrise en sociologie. Par ailleurs, je suis le vice-président du comité local de la Croix-Rouge de Bondoukou et également le Commissaire aux comptes de l’Association des écrivains de Côte d’Ivoire (AECI). De façon succincte, voilà qui est l’auteur de VERS-TIGE que je suis.

Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire VERS-TIGE ?

« Si les Africains ne racontent pas l’Afrique, elle disparaîtra », nous dit Sembène Ousmane. Je suis donc de ceux qui se sont imposé le devoir de raconter l’Afrique, de parler de l’Afrique telle qu’elle est, mais surtout de parler à l’Afrique, qui en a besoin. Le constat est, en effet et malheureusement, que l’Afrique, pleinement engagée dans la modernité, se croit obligée de mépriser ses coutumes et ses mœurs, disons les valeurs fondamentales qui la caractérisent. Les Africains sont ainsi engagés dans une aventure où ils sont en train de perdre une partie de leur essence, donc de leur âme.

Notre Afrique est donc, et c’est le moins qu’on puisse dire, en décrépitude, habitée par de grandes douleurs et victime de déracinement culturel. C’est ce drame que je peins, en tant que poète. Qui pourrait, en effet, mieux que le poète, traduire à leur juste mesure nos états d’âme, nos préoccupations, nos angoisses, liés à ce mal-être existentiel ? Qui pourrait décrire, plus que le poète, l’irréversible assassinat de nos valeurs culturelles ? Le poète, comme le griot, est la mémoire du peuple. Il en est également l’éclaireur. Ainsi, comme tout bon poète, je suis un homme de mission au regard acéré. Je suis en mission afin qu’on ne fasse pas table rase de la tradition.

Je suis aussi en mission pour me battre contre l’injustice qui s’épanouit sous nos yeux, car je suis allergique à tout acte d’injustice. En fait, dans VERS-TIGE, je fais ressortir ce qui me caractérise le mieux : l’engagement. Aussi, je suis poète et je n’ignore pas que le poète doit se faire tisserand d’un nouveau contrat social. Et cela passe par l’interpellation des consciences. Je suis poète et je n’ignore pas que la meilleure manière d’être utile à ma société est de veiller, comme l’oiseau Zakwato de la mythologie bété, qui a pris l’engagement de ne plus dormir afin de pouvoir alerter à temps la tribu de l’invasion ennemie.

Pourquoi avoir choisi ce titre ?

La littérature est un art. Par conséquent, un texte poétique est un objet d’art et tout objet d’art relève de la créativité. VERS-TIGE est donc le produit de la créativité. C’est un mot créé et monté de toutes pièces et qui peut être appréhendé selon plusieurs dimensions. N’oublions pas que le poète est avant tout un artiste qui utilise tout autant l’extraordinaire, le beau, le mystique que la parabole.

Mon confrère GUE Danh Désiré, le préfacier de cette œuvre poétique, l’a tellement bien compris qu’il tente une explication très intéressante de ce concept. Et voici ce qu’il dit : « La première chose qui vous secoue est son titre. Il est le signe de la poéticité du recueil. Il est chatoyant et, à l’instar du caméléon dont la vraie couleur reste indéfinissable, le sens exact de VERS-TIGE est pour moi asymptotique.

Et c’est tant mieux pour l’analyse littéraire ! J’ai d’abord pensé à des vers qui donnent le VERTIGE ; ensuite, je me suis dit qu’il s’agissait plutôt de VERS qui, comme une TIGE, soutiennent solidement le feuillage et maintiennent l’arbre debout. Puis enfin, je me suis dit que les poèmes de ce recueil étaient des VESTIGES d’une humanité évanescente que le poète tente obstinément de réveiller. Tout cela semble explicite. Mais à la fin du parcours, rien ne vous reste définitivement acquis. Quelle que soit votre compréhension, des passages suggestifs vous orientent et finissent par vous perdre comme un aveugle qu’on guide et qu’on abandonne à mi-chemin. Sans repère ! » En conclusion, sachez que le titre résume bien tous les poèmes contenus dans ce recueil ; et que chacun peut tenter son explication personnelle, après sa lecture.

De quoi parle cette œuvre ?

Chaque genre littéraire offre un moyen différent de s’exprimer. Et la poésie me permet de me plonger dans mes émotions en dénonçant les tares de nos sociétés. Aussi, il faut dire que cette œuvre littéraire nous ramène à la source de notre patrimoine culturel. C’est vraiment regrettable que ce trésor culturel, cher à nos aïeux, aujourd’hui, tende à s’effacer de la mémoire de la nouvelle génération, plus rapidement qu’il ne s’y est gravé.

Cette œuvre nous plonge dans notre patrimoine ancestral et met en lumière des valeurs constructives qui peuvent nous aider à nous perfectionner pour avancer. Par ailleurs, elle ressuscite la Négritude, fait l’apologie de nos résistants, rend hommage à nos pionniers littéraires et fait une incursion dans l’univers de la dépravation des mœurs qu’elle dénonce. C’est une œuvre de la parole belle, bonne et redoutable.

Pourquoi avez-vous décidé d’aborder ce sujet ?

Si le lézard hoche la tête, c’est parce qu’il a quelque chose de trop lourd sur la conscience à dire, selon un proverbe africain. Aujourd’hui, les Africains veulent s’occidentaliser, abandonnant leurs us et coutumes, au point d’être des aliénés culturels. Et cela va même jusqu’à l’oubli des héros et des résistants qui ont fait et marqué l’histoire de l’Afrique.

Nous nous sommes endormis dans un monde et nous sommes en train de nous réveiller dans un autre monde. Une vraie race de mutants ! C’est ce que nous sommes devenus. Ainsi, VERS-TIGE tire la sonnette d’alarme afin que nous, les Africains, commencions à prendre conscience de l’importance de nos cultures.

Et cette prise de conscience doit commencer par l’attachement à nos valeurs culturelles et à notre histoire. Un dicton brong nous enseigne que la durée de vie d’un poussin dépend en partie de la présence de l’épervier. Ce que je veux dire aux Africains, c’est que nous devons refuser de faire de la modernité un épervier pour notre tradition. Nous devons plutôt faire d’elle un allié pour nos poussins. Car on peut se développer tout en protégeant son socle culturel.

Quelle est la visée de cette œuvre ?

Notre Afrique agonise dans les mains dénaturées de ses fils qui ont épousé les mœurs de l’Occident. Ce qui fait que l’Africain se retrouve comme un nénuphar sans lien avec la terre nourricière. Dans ce contexte, cette œuvre vise la préservation du patrimoine culturel de l’Afrique et des valeurs entretenues par nos ancêtres et nos anciens, gardiens du temple. Et cela doit, selon moi, commencer au niveau de l’école et de la famille. Elles sont les premiers endroits de sensibilisation et de promotion de nos valeurs culturelles. Elles sont également les lieux de transmission des idées, des pensées, des connaissances, de nos us et coutumes. Dans ce sens, la première cible de cette œuvre est la nouvelle génération à qui il faut donner la possibilité de découvrir la tradition, en lui donnant des raisons de croire en elle. C’est de cette unique façon que nous pourrons éviter d’être étrangers à nous-mêmes.

Dans l’ordre chronologique de parution, quel rang occupe VERS-TIGE ? Et quelles sont les autres œuvres que vous avez publiées ?

VERS-TIGE est mon deuxième recueil de poèmes après SOUFFLE, au programme scolaire, en classe de première. Mais, dans ma bibliographie, c’est mon neuvième livre édité. Les autres œuvres sont : Un préservatif au couvent (recueil de nouvelles), Souffle (recueil de poèmes), La rivière maudite (recueil de nouvelles), À l’ombre du feu (recueil de contes), Akissi ou la force du destin (roman), Le ballet des hypocrites (recueil de nouvelles), L’héritière de l’Oncle-sans-âge (roman), L’ultime prolongation (roman).

Que doit-on retenir de l’œuvre VERS-TIGE en quelques mots ?

VERS-TIGE est un cri du cœur pour la sauvegarde de notre patrimoine ancestral. C’est aussi un hymne en l’honneur de nos résistants africains terrés dans le sable mouvant du silence et jetés aux oubliettes.

Envisagez-vous un prochain livre ? Si oui, sur quel sujet portera-t-il et pourquoi ?

Je compte très bientôt publier un recueil de nouvelles intitulé : AU NOM DE LA PATRIE. C’est une œuvre très engagée. Une capture saisissante de scènes de la vie. Je m’invite dans l’intimité de nos consciences, dans les manufactures de la misère, de l’égoïsme, de la rapine et du sous-développement.

Avez-vous reçu des prix honorifiques ? Si oui, lesquels et en quelle année ?

J’ai été lauréat de divers petits prix littéraires. Mais, ma première œuvre littéraire qui m’a révélé  au public, intitulée Un préservatif au couvent , a reçu le prix Édition du Salon international du livre d’Abidjan en 2019 (SILA-2019). Je suis convaincu que d’autres prix littéraires majeurs me seront attribués bientôt.

Exercez-vous d’autres activités ? Si oui, lesquelles ?

Je suis un passionné du métier de la terre. Donc, à mes temps libres, je suis un planteur (cacaoculteur).

 Votre mot de fin.

Je voudrais vous remercier pour l’intérêt que vous portez à mon nouveau recueil de poèmes. Merci pour l’accompagnement et la visibilité que vous donnez à tous les auteurs de JD Éditions.

 

Source : jdeditionsmagazine.tv

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